mardi 28 septembre 2010

Les Poux par Diego

LES POUX

Une épingle à nourrice en travers du nez, trois bouts de chiffons en guise de jupe et un vieux débardeur bien trop grand, elle déambulait entre le Pont La Feuillée et le Quai Saint Antoine, aguichant le passant en quête d’exotisme facile pour mieux le narguer une fois la pièce soutirée.
On aurait pu croire à son accent qu’elle était anglaise, et à sa chevelure de feu irlandaise, mais un henné qui avait mal viré et l’élocution pâteuse des junkies expliquaient l’un et l’autre. Malgré tout les badauds s’y laissaient piéger et loin de moi l’idée de leur jeter la pierre : je fus l’un d’eux !
Le jour où, penaud, je me confiai à ma mère et que, fouillant dans ma tignasse de jeune qui veut bouffer le monde elle y trouva non seulement des poux, mais aussi des lentes, je pavoisai moins. Inquiète à l’idée que mon père puisse s’en apercevoir, lui pour qui tout parasite qui soit et quelle qu’en fut sa provenance était affaire de miséreux, elle utilisa en ces temps de vaches maigres les moyens du bord.
Pour me défaire de l’invasion naissante elle me fit passer une nuit entière la tête imbibée de pétrole lampant et enturbannée dans une serviette. Efficace en diable contre les anoploures et leur progéniture certes, mais aussi pour vous dessécher le cuir chevelu et vous donner l’impression qu’un élastique géant vous enserre le crâne et cherche à le fuir par le haut en permanence. J’avais des envies furieuses de me marteler le crâne à coups d’extincteur. Par bonheur mes parents n’en possédaient pas ! Je tins bon.
La morale de cette aventure de jeunesse c’est que si depuis j’ai donné prise quelquefois encore à des émois passager pour des qui ne semblaient pas autochtones et trémoussaient des hanches (fan de Ferré « j’aimais déjà les étrangères quand j’étais un petit enfant »), j’en restai toutefois à une distance de sécurité respectable et m’en suis toujours bien trouvé !

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